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Artist/Band: Leo Ferre
Lyrics for Song: Les Assis
Lyrics for Album: Les Poetes [2006]



(Léo Ferré/Arthur Rimbaud)



Noirs de loupes, grêlés, les yeux cerclés de bagues

Vertes, leurs doigts boulus crispés à leurs fémurs

Le sinciput plaqué de hargnosités vagues

Comme les floraisons lépreuses des vieux murs...

Ils ont greffé dans des amours épileptiques

Leur fantasque ossature aux grands squelettes noirs

De leurs chaises, leurs pieds aux barreaux rachitiques

S'entrelacent pour les matins et pour les soirs !



Ces vieillards ont toujours fait tresse avec leurs sièges

Sentant les soleils vifs percaliser leur peau

Ou, les yeux à la vitre où se fanent les neiges

Tremblant du tremblement douloureux du crapaud.

Et les Sièges leur ont des bontés: culottée

De brun, la paille cède aux angles de leurs reins

L'âme des vieux soleils s'allume, emmaillotée

Dans ces tresses d'épis où fermentaient les grains.



Et les Assis, genoux aux dents, verts pianistes

Les dix doigts sous leur siège aux rumeurs de tambour

S'écoutent clapoter des barcarolles tristes

Et leurs caboches vont dans des roulis d'amour.

- Oh! ne les faites pas lever! C'est le naufrage...

Ils surgissent, grondant comme des chats giflés

Ouvrant lentement leurs omoplates, ô rage !

Tout leur pantalon bouffe à leurs reins boursouflés.



Et vous les écoutez, cognant leurs têtes chauves

Aux murs sombres, plaquant et plaquant leurs pieds tors

Et leurs boutons d'habit sont des prunelles fauves

Qui vous accrochent l'Å“il au fond des corridors !

Puis ils ont une main invisible qui tue

Au retour, leur regard filtre ce venin noir

Qui charge l'Å“il souffrant de la chienne battue

Et vous suez, pris dans un atroce entonnoir.



Rassis, les poings noyés dans des manchettes sales

Ils songent à ceux-là qui les ont fait lever

Et, de l'aurore au soir, des grappes d'amygdales

Sous leurs mentons chétifs s'agitent à crever.

Quand l'austère sommeil a baissé leurs visières

Ils rêvent sur leur bras de sièges fécondés

De vrais petits amours de chaises en lisière

Par lesquelles de fiers bureaux seront bordés



Des fleurs d'encre crachant des pollens en virgule

Les bercent, le long des calices accroupis

Tels qu'au fil des glaïeuls, le vol des libellules

- Et leur membre s'agace à des barbes d'épis.


Album Lyrics: Les Poetes [2006]


Leo Ferre
"Les Poetes [2006]"


1. Elsa
2. Je Chante Pour Passer Le Temps
3. L'Étrangère
4. Les Assis
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